Jean-Claude Alain (2), le témoignage de Gabriel Matzneff
Je constate que mon article sur Jean-Claude Alain, récemment décédé, est celui qui suscite le plus de réactions. J'en propose un petit complément aujourd'hui.
Je ne ferai pas l'injure à mes lecteurs de leur présenter Gabriel Matzneff.
Chacun connaît ses talents littéraires et ses dilections sulfureuses (cf. "Les moins de 16 ans"). Du reste G.M. s'est lui-même mis en scène dans ses carnets, sans pudeur excessive.
La piste de Matzneff m'est apparue par une allusion qui est faite aux "amours adolescentes" dans le premier tome de
" Pierre Joubert, 70 ans d'illustration pour signe de piste" édité par Delahaye.
Le roman "Le signe dans la pierre", de Paul Henrys, est apparemment un must dans le panthéon des pédérastes. Gabriel Matzneff en parle explicitement, du reste, en 1953. Par intérêt pour le roman de Paul Henrys, je me suis mis à lire les mémoires de Matzneff.
Il nous conte avec certains détails, parfois assez glauques, les relations sexuelles qu'il entretenait avec des gamins, parfois de 13 ans, dont des scouts.
Les deux premiers tomes de ses mémoires sont, a cet égard, assez éclairants sur un certain milieu orthodoxe russe des années 50- 60, sur des scouts russes, et sur JCA.
Le premier tome de ses mémoires , "Cette camisole de flammes", est édité en 1976; il retrace la période 1953-1962. Je me bornerai à citer les passages où l'auteur fait allusion au scoutisme et à JCA.
La première mention date du 30 janvier 1959. A cette époque JCA était déjà chef de la FSE:
"Je passe l'après-midi avec Jean-Claude Alain, dans son local scout proche de la Madeleine.
Au débotté, je le mets au parfum:
-Je suis le type de garçon qui doit vous être antipathique, vous le chrétien engagé, car non seulement je ne milite pas, mais je suis hostile à toute attitude militante. Je ne crois pas au progrès, surtout pas au progrès spirituel, et il m'est impossible d'adhérer à une cause. La lucidité tue l'action.
Il me répond que lui non plus ne croit pas au progrès, mais qu'il pense pouvoir faire du bien dans un cadre restreint (sa troupe scoute), et il me cite l'exemple de deux garçons qui s'aimaient éperdument, qu'il savait rendre heureux en les envoyant tous deux en voyage d'exploration , et qu'il l'avait fait."
Ne nombreuses autres mentions sont faites au sujet de Jean-Claude Alain dans ce premier tome (10), où Matzneff ne cèle en rien ses dragues et relations sexuelles avec de jeunes adolescents.
Page 147, une citation troublante dans ce sens: "Dalens aurait dit un jour à Jean-Claude Alain: "Savez-vous à quoi l'on reconnaît un pédéraste? A son regard."
Et c'est vrai : le regard filtrant sous la paupière tombante, le coup d'oeil aigu, et cependant furtif... La tension extrême qui veut passer pour de la désinvolture. Surtout, ne pas avoir l'air de ce qu'on est."
Le deuxième tome des mémoires est encore plus troublant. Il s'agit de "L'archange aux pieds fourchus", qui retrace la période 1963-1964.
Page 56, Matzneff raconte comment il drague un gamin autrichien de 12 ans, Renato, qu'il qualifie de "sensuel, caressant, voluptueux."
On atteint quand même l'abject par la suite:
"22 juillet. Avec le père de Renato, j'ai frôlé le drame.
C'est ma fausse carte de chef scout, fournie avant mon départ par J.C. A., qui m'a sauvé la mise. Prestige de l'estampille officielle! M'ayant admis comme pédagogue de métier, cet abruti a cessé de voir d'un mauvais oeil que Renato fût tout le temps fourré auprés de moi. A présent, il me surprendrait en train de sodomiser son fils, il imaginerait qu'il s'agit d'un de ces "grands jeux" dont les scouts ont le secret. Comme me le disait un jour Montherlant, pince- sans- rire: "Le scoutisme a rendu d'inappréciables services à la cause!" (à suivre)